FESTIVAL DE BEITEDDINE

Après deux ans d’interruption forcée, le Festival de Beiteddine est de retour. Sur une note d’espoir…À l’orée d’une période de paix, de stabilité et de réconciliation nationale (on l’espère du moins !), c’est un festival riche en symboles qui s’annonce. Le premier étant la reprise d’un mode de vie normal. Cette édition, préparée durant une période difficile, se voulait déjà, avant l’accord de Doha, l’expression de la volonté de vivre des Libanais, dans un pays pluriculturel et sur une terre où cohabitent en harmonie toutes les civilisations. Elle exprime plus que jamais cette volonté, ainsi que celle des organisateurs de festivals au Liban, qui veulent continuer à y convoyer les arts et la culture dans leurs différentes facettes humaines et internationales. C’est ce qu’a affirmé en substance Nora Joumblatt, la présidente du comité de Beiteddine, au cours d’une conférence de presse, tenue, hier, à la Salle de verre du ministère du Tourisme, pour annoncer le programme de l’édition 2008, en présence du ministre (sortant) du Tourisme, Joe Sarkis, qui a également fait part de ses espérances touristiques pour cet été.
Étaient également présents, les présidentes et membres des comités des autres festivals, notamment May Arida, présidente du Festival de Baalbeck, qui, a-t-elle indiqué – crûment –, a choisi la voie du partenariat avec le Festival de Beiteddine « afin de contrer les enchères des artistes étrangers avec lesquels nous traitons ».
Nora Joumblatt a, par ailleurs, souligné que les prix des tickets ont été spécialement étudiés cette année pour être accessibles au plus grand nombre, et que les prix des transports en pullman ont été réduits et ramenés de 12 000 LL à 5 000 LL par passager, le festival prenant à sa charge la différence de coût.
C’est une reprise en douceur, avec des artistes étrangers qui, la plupart, connaissent le Liban pour s’y être déjà produits, qu’annonce la programmation de Beiteddine 2008, qui s’établit comme suit :

Le 11 juillet
Karima Skalli, qui s’impose actuellement comme la grande voix de la chanson marocaine et arabe, offrira au public de Beiteddine un concert sur fond de projection de films d’Asmahan (grâce à la collaboration de la Fondation Liban Cinéma).
De l’opéra du Caire à l’Institut du monde arabe à Paris, de Vienne à Carthage, en passant par Sarajevo, Karima Skalli multiplie depuis quelques années collaborations et créations, avec discrétion et simplicité.
La chanteuse marocaine, qui se balade en toute aisance du patrimoine andalou aux classiques arabes, non sans un détour par la tradition soufie, sera accompagnée par le fameux Orchestre el-Hefny du Caire.

Le 15 juillet
Branford Marsalis est né en 1960 dans une famille de musiciens. Son père, Ellis, pianiste et grande figure du jazz de la Nouvelle-Orléans, avait pour habitude d’offrir à chacun de ses enfants un instrument de musique différent. Pour Branford, ce sera le saxophone.
Musicien et compositeur de jazz, mais aussi acteur et producteur de son propre label Marsalis Music, le saxophoniste américain, titulaire de trois Grammys, est une pointure du jazz. À la tête de son quartette, composé de Joey Calderazzo au piano, d’Eric Revis à la contrebasse et de Jeff Watts à la batterie, il révèle son habilité à exprimer toutes sortes d’émotions : un sens de l’histoire (Footsteps of our Fathers en 2002 et le DVD Coltrane’s ‘A Love Supreme’ Live in Amsterdam), une sensibilité ouverte aux autres disciplines artistiques et un profond sens de l’intimité qui renouvelle le genre des albums de ballades (Eternal en 2004).
Son dernier opus, Braggtown, sorti en 2006, reprend tous ces éléments et bien d’autres encore. C’est son album le plus dense, qui s’inspire d’un univers très large, depuis le compositeur du XVIIIe siècle au guerrier indien, ou encore le film d’horreur japonais…
Avide de rencontres musicales, cet artiste éclectique, qui a collaboré avec Sting, a touché à plusieurs genres musicaux de l’orchestre classique au pop/rock/funk et qui a dispensé son enseignement musical auprès de différentes universités américaines, est doté d’une prodigieuse technique. Il est capable de rendre hommage à ses pairs, tels que Coltrane, Coleman ou Sonny Rollins, et d’honorer de grands compositeurs classiques…

Le 19 juillet
Guitariste, chanteur et compositeur, Gilberto Passos Gil Moreira, dit Gilberto Gil, est né au Brésil. Diplômé en gestion et administration, il obtient son premier emploi dans l’entreprise Gessy Lever, actuellement Unilever. Mais c’est la musique qui le rend célèbre dans les années 60. Il est aujourd’hui ministre de la Culture du Brésil du gouvernement Lula da Silva depuis janvier 2003 et grand officier de la Légion d’honneur. Un an plus tôt, il s’était produit à Baalbeck.
Gil commence sa carrière comme musicien de bossa-nova, mais se met rapidement à composer des chansons centrées sur la politique et l’activisme social, avec son camarade Caetano Veloso. Dans les années 70, l’artiste enrichit sa musique de nouveaux éléments, inspirés des musiques africaine et nord-américaine. En 1969, Gil et Veloso, dont l’importance au Brésil était d’une certaine forme comparable à celle de Lennon et McCartney, sont taxés de subversion et emprisonnés par le régime militaire brésilien instauré en 1964. Ils s’exilent tous deux à Londres. Si l’un de ses plus grands succès est le titre Toda menina baiana de 1979, son album de 1993, Tropicália 2, avec Caetano Veloso et comportant une chanson de Jimi Hendrix, Wait Until Tomorrow, est considéré comme l’une de ses meilleures œuvres depuis la fin des années 60.

Les 23, 24 et 25 juillet
Accompagné d’un orchestre sur scène, comme c’est la tradition en Argentine, Le Carlos Gardel Esquina est un spectacle haut en couleur présenté par la plus célèbre troupe de tango du moment et qui narre, en plusieurs tableaux de musique, chants et danses, l’histoire du tango qui se confond avec celle de Carlos Gardel. Ce chanteur d’origine française devint à Buenos Aires la figure emblématique du tango argentin.

Le 27 juillet
C’est sans doute, pour les jeunes, l’événement de l’été. Produit par le Festival de Beiteddine en collaboration avec le Festival de Baalbeck et NRJ, Mika donnera un concert, en soirée unique, place des Martyrs, à Beyrouth, afin de pouvoir accueillir pas moins de 15 000 personnes.
Qui ne connaît pas Mika ? Le compositeur et chanteur Michael Holbrook Penniman, dit Mika, que nous avons déjà présenté dans ces mêmes colonnes en avril 2007, est la star pop du moment. Il caracole au hit-parade de la chanson internationale.
Né à Beyrouth d’une mère libanaise et d’un père américain, Mika a un an lorsque sa famille quitte le Liban pour s’installer à Paris. Ses premières expériences professionnelles dans la musique sont éclectiques. On dit de sa tessiture qu’elle couvre 4 octaves, il affirme qu’elle est en réalité plus proche de 3 octaves et demie.
Son premier succès, intitulé Relax, Take It Easy, l’a propulsé, il y a un peu plus d’un an, en tête des hit-parades en Angleterre. Suivi de son non moins célèbre tube Grace Kelly. Puis c’est l’album entier Life In Cartoon Motion, sorti en février 2007, qui va faire un tabac. Cet album a pour thème principal la transition de l’adolescence à l’âge adulte. Il s’impose un peu partout en Europe. Il devient notamment numéro un en Angleterre, en France, en Belgique, en Suisse et termine en tête des ventes annuelles d’albums en France. En 2007, il est certifié disque de diamant.
En 2007 également, Mika a obtenu trois récompenses à la cérémonie des World Music Awards. Il est le premier artiste à avoir gagné trois World Music Awards en une année seulement. En 2008, le chanteur reçoit le trophée de la révélation internationale de l’année aux NRJ Music Awards et celui de la révélation britannique aux Brit Awards.

Le 1er août
Devenu incontournable à Beiteddine, le chanteur irakien Kazem as-Saher fait régulièrement, presque chaque année, chavirer le cœur des festivaliers avec sa poésie chantée et ses chants nationalistes. Ses performances à Beiteddine ont une saveur spéciale que ne se lassent pas de goûter et de regoûter ses aficionados.

Le 9 août
Magida el-Roumi n’est plus à présenter au public. Cette grande chanteuse a commencé sa carrière musicale au début des années 1970 quand elle a participé à une émission télévisée musicale Studio al-Fan (Studio des artistes) où elle a remporté la médaille d’or en chantant Layal el-Onss fi Vienna.
Fille du grand musicien Halim el-Roumi, c’est sa première chanson dédiée au Liban, A’am Behlamak ya Helm ya Lebnan, qui sera son premier succès. Dès lors, elle accumule des succès en chantant des chansons patriotiques comme Beyrouth Sit el-Dounia, Jayi min Beyrouth (Je viens de Beyrouth), Nabeh el-Mahabbi (Lac de l’amour) et des poèmes d’amour comme Kalimaat (Paroles), Ent w’ ana et beaucoup d’autres. Propulsée au-devant de la scène, elle conquiert le cœur des Libanais avec sa voix puissante et unique, et devient la diva nationale. Elle organise alors des concerts partout dans le monde : en France, aux États-Unis, au Canada, en Australie et dans tout le Moyen-Orient. Son dernier album, E’etazalt el-Gharam (J’ai quitté l’amour), sorti en 2006, est un grand succès avec la chanson Shouf Shouf (Regarde, regarde) qui refera parler d’elle après de longues années d’absence.

Le 12 août
C’est par un double concert, présenté par deux jeunes talents libanais, que le Festival de Beiteddine clôturera la saison. Un concert en deux parties. D’abord le violoncelliste Nassib Ahmadieh, qui fait partie du Al-Diwan Orchestra que dirige le célèbre Daniel Barenboim, et le contre-ténor Matteo. Ce dernier sera accompagné à Beiteddine par l’Orchestre symphonique national libanais.
Si Nassib Ahmadieh est un virtuose « classique », dans la deuxième partie, Matteo, lui, est un phénomène à part entière. Contre-ténor dans la plus pure tradition des castrats du XIIIe siècle, il a une voix ample et généreuse, un vibrato rare.
Né à Beyrouth, Matteo a grandi dans une famille où la musique occupe une place prépondérante. Classique ou sacrée, chant lyrique ou opéra, il capte très jeune toutes les harmonies et retient les mélodies. Dès l’âge de 8 ans, il est initié au solfège et débute des cours de piano. À 12 ans, il connaît par cœur le Magnificat de Bach, le Requiem de Mozart,
le Te Deum de Marc-Antoine Charpentier, Sheherazade de Rimsky-Korsakov, le Lac des Cygnes de Tchaïkovsky.
Alors qu’il chante pour des amis dans un restaurant à Beyrouth, sa voix et son interprétation sont remarquées. À la fin de la soirée, on lui propose de faire un essai. Dès lors, tout va très vite. Il décroche un contrat, suivi de l’enregistrement d’un album à Paris.
Matteo est moderne, baroque, théâtral et spectaculaire. Il crée un espace imaginaire, provoque la collision du monde de l’opéra et du rythme dansant de la pop. Il joue avec les oppositions, avec le feu et la glace, le classique et le moderne, le masculin et le féminin, le sérieux et le déjanté.

* Billets en vente dans toutes les branches de Virgin, à partir du 10 juin.

 

 

L'orient le jour
Vendredi 30 mai 2008