Patti Smith, « Parce que la nuit lui appartient »

Festival de Byblos - Un coup d’envoi très « rauque and roll »


 
 

Ils sont venus, ils étaient tous là. Jeunes « hippys » acharnés, adultes nostalgiques du passé, passant la relève à une nouvelle génération également « addicted » à sa musique… Ils étaient tous là pour voir la star mythique du rock and roll des années 60, et ils n’ont pas été déçus.
Face à la mer et dos à la citadelle, devant une audience bigarrée à laquelle le président de la République Michel Sleiman et son épouse ont fait la surprise de leur présence, Patti Smith a interprété durant plus d’une heure trente un florilège de ses anciens et nouveaux tubes.
Longue figure à la Modigliani et allure androgyne, la rockeuse n’a pas pris une seule ride. Sa voix non plus. Entourée de ses compagnons de toujours : les non moins mythiques Lenny Kaye à la guitare et J.D. Daugherty à la batterie, rejoints par le fils de l’artiste, Jackson Smith, également à la guitare, et par le bassiste Tony Shanahan (valsant à loisir avec les synthés), l’icône du rock, dans son Levi’s vintage, sa chemise blanche, sa veste d’homme et ses bottes, a propulsé l’audience électrifiée, à des années lumière en arrière.
L’interprète chante la paix, s’adresse à Beyrouth en lui envoyant un message de renaissance. We shall live again, clame-t-elle avec force, et ses paroles prennent l’allure de prophétie. Soudain, une brise marine chargée de « Peace and Love » rafraîchit l’air doux de Byblos. Avec des tubes comme « Because the night », mille fois interprété et remixé, et des titres engagés comme Qana (composé il y a quelques années en commémoration du massacre), l’égérie de la scène punk-rock-new-yorkaise a brisé toutes les chaînes en chantant l’amour et la liberté, hurlant l’injustice et bafouant les régimes répressifs.
Passionnée de musique, Patti Smith qui, de Bob Dylan à Nirvana, a traversé tous les âges avec la même attitude, n’a rien perdu de son punch. Avec ce même grain de voix cassée, Smith a enrichi ses harmonies d’expériences de vies. Ses chansons portent les stigmates de blessures personnelles (la mort de son frère et de son compagnon de vie), ou collectives, mais également les traces de résurrection.
Sur le port de Jbeil, transformé en scène musicale, le public scande avec les musiciens et l’atmosphère s’échauffe. Généreuse, Patti Smith va au-devant de son audience et salue le président ainsi que la première rangée.
La rockeuse, qui a connu dans sa vie toutes les guerres, appelle à leur abolition. Dans un Liban en reconstruction, le message prend une tout autre dimension et la paix semble soudain possible… À l’ombre de la voix de Patti Smith.

Colette KHALAF (L'orient Le Jour)